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Ce 5 septembre, en allant vers Le Plessis l'Evêque, ils tombent sur une embuscade et se trouvent sous le feu de l'artillerie ennemie qui est à 800 mètres.

 

Ils ignorent que ce sont les premiers tirs de la bataille de la Marne.


Ils se placent en ligne de sections par 4 et avancent doucement sous les obus (nous sommes à la fin de l'été) et cette plaine est découverte dominée par les collines de Montgé et Monthyon tenues par les Allemands. A 15 heures ordre d'avancer vers la ligne de feu vers Monthyon qui doit être pris à la baïonnette.

 

Ils traversent une route et dans une descente "les boches nous fusillent comme ils veulent car eux sont bien retranchés et nous attendent". Le capitaine et 2 lieutenants ont été tués. Le capitaine Guérin les lieutenants Charles Péguy et de La Cordillère sont tombés près d'eux. 

 

Un "sauve qui peut" est lancé et les rangs s’éclaircissent, les tirs croisés des allemands, malgré l'artillerie française qui tire aussi, fait des ravages. Le petit groupe attend la nuit dans un fossé et ramène les blessés en arrière.  Des hommes de l'escouade sont tombés.

Soldats en position avant de traverser la route 114

Après le combat ils se retrouvent à 50 hommes avec l'adjudant Marcheray comme chef.

Ils rentrent sur Vinantes.


Le 6 dès 5 heures départ sur Nantouillet où ils reçoivent l'ordre d'escorter un convoi vers l'avant  jusqu'à Plessis L'Evêque et de là ils vont vers Monthyon.

 

Ils reçoivent de la nourriture (rien touché depuis 2 jours). Après avoir mangé le petit groupe reçoit l'ordre d'un gendarme (?) de se porter sur Barcy au nord de Meaux.

 

Une charge de fantassins 1914

Dans un chemin, ils retrouvent un adjudant de la compagnie et font une pause. Mais le 289eme "lâche pied".

Rassemblement et en avant. 

 

C'est un Sous lieutenant de chasseurs à pieds qui les commande ; ils essuient le feu de l'infanterie ennemie et surtout des  mitrailleuses. La nuit venue, couvert par l'artillerie française ils rentrent à Monthyon.


Ouf, "ayant encore eu la chance pour cette fois de n'être pas attrapé". Il indique qu'il a combattu avec les Marocains (dont la division était sur leur droite)"qui sont cependant hardis mais qui lâchent pieds aussi vite que nous".
 

7 septembre : rassemblement dès après le réveil à 4 heures pour retrouver ce qui reste du régiment.

Après les lourdes pertes, les compagnies sont reconstituées et un nouveau capitaine est nommé, Claude Casimir Perrier, fils de l'ancien Président de la République, ami de Péguy et qui était lieutenant dans une autre Cie du 276eme.
La troupe touche des vivres et retour en arrière par crainte d'un mouvement de l'ennemi.

Mais rien heureusement. "Ce qui nous fait le plus de peine c'est de repasser devant les cadavres de tous les copains qui ne sont pas encore enterrés". Bivouac au sud de Monthyon.

Soldats tués 1914

8 septembre : départ tôt après réveil à 4 H. Dans la plaine, en avant. Ils sont entre St Soupplets et Marcilly. Le canon toujours.

 

"les boches prennent la pâtée".


L'après-midi vers Barcy, toujours les obus qui tombent, preuve que les Allemands couvrent leur retraite. Bivouac, mais pas d'eau. Il fait 7 kms avec un copain pour rapporter 2 seaux.


Le 9 toujours en avant tôt le matin, mais ils s'arrêtent dans un chemin et bivouac de nouveau au même endroit que la veille. Enfin le canon cesse. "on se croirait aux manœuvres tellement c'est calme".
Le 10  départ vers Lizy sur Ourcq ; La poursuite commence.

     Voici ce qu'a écrit Victor Boudon dans son livre "Mon lieutenant Charles Péguy" (Albin Michel) :

 

"Le Général Leguay me disait" (en 1916) :" Je verrais volontiers mettre en relief que c'est la 55eme Division qui eût l"honneur le 5 septembre vers midi de recevoir et de renvoyer les premiers coups de canon - prélude à la bataille de l'Ourcq"
"J’ ajouterais" dit V. Boudon," que c'est Charles Péguy et trois cents de ses "gars" qui ce 5 septembre 1914 devant le petit village de Villeroy, à cette même place entre Neufmontiers et Iverny, au point le plus proche de Paris, vont marquer le point d'arrêt et y dresser leurs corps la borne contre laquelle va butter et s'arrêter l'avalanche.


C'est le 5ème bataillon du 276ème et en particulier la 19ème compagnie qui en se sacrifiant, obligea les Allemands à un repli précipité de 8 à 12 kilomètres, repli qui contribua pour une large part à la Victoire."

 

La 19eme compagnie du 276eme de ligne perdit ce 5 septembre les 3/4 de son effectif avec la perte de 3 officiers (sur quatre) et plus de 150 morts et blessés.

carte bataille de la Marne 1914

Les Allemands ont reculé devant la résistance puis la contre attaque française.

Le 10 septembre direction Lizy sur Ourcq en passant par Etrépilly. Beaucoup, beaucoup de cadavres, surtout des allemands. Les villages ont été brûlés lors de la retraite. Une pause sur les hauteurs où se sont déroulés de terribles combats.

Et on repart par Vincy-Manoeuvre. Plus une maison debout. "je n'ai rien vu de pareil". Puis Auteuil en Valois où il y a beaucoup de blessés allemands que l'armée qui se retire n'a pu prendre en charge.
Toujours à la recherche de l'eau, est envoyé en corvée d'eau, perd la colonne pour ne la retrouver que le soir à 21H.
Cantonnement à Thury en Valois.


Le 11, départ tôt comme toujours à la poursuite des boches qui ne sont qu'à 1H30 devant selon les habitants qui sont restés. Traversée de la forêt de Villers-Côtteret, puis Oigny où "les habitants sont heureux de voir des culottes rouges". La nourriture : des pommes trouvées sur le bord des chemins, car l'intendance ne suit pas.

 

Marche à travers champs sous la pluie. Arrêt à Longpont pour s'abriter. Peu après être reparti, demi-tour, erreur de route. La route de Soissons est trouvée à 18H. Peu avant Cravanon, demi-tour de nouveau, le pays est bombardé par les Allemands qui couvrent leur retraite.
Le cantonnement se fait à Vertes Feuilles.


Le 12, départ en formation de combat vers Soissons, sous la pluie.
Un aéro ayant repéré la troupe, l'artillerie allemande tire et fait des blessés. On repart malgré tout en formation de tirailleurs
.

En route vers les portes de Soissons.

Les obus tombent à foison.  A St Christophe on est dans une ferme qui est  aussitôt bombardée.

Marche en avant sous les obus et les voilà dans Soissons. "déjà fort éprouvé".

 

Bon accueil de la population après 12 jours d'occupation allemande.  Tentative d'approche de l'Aisne mais la troupe est stoppée par les mitrailleuses allemandes. L'ennemi est au contact.

Pont détruit à Soissons

Nuit en ville et pour la première fois depuis le début de la guerre ils mangent dans des assiettes. Le sergent major Matteï paye le champagne pour arroser ses galons. ( Mon Grand-père restera en contact avec Georges Matteï jusqu'à son décès).  Ce dernier a écrit à ma Grand-mère en 1971 après le décès de mon Grand-père " nous étions avec le caporal Briffault trois amis inséparables"

 

Dimanche 13 septembre : passage de l'Aisne sur un pont en partie détruit, et ils entrent dans St Waast. Ils tentent de conquérir la crête "en utilisant les replis du terrain nous avançons sous les obus". Objectif: une batterie ennemie.  Les deux compagnies qui montent à l'assaut s’ abritent dans un petit bois et de là ils voient les Allemands  faire des tranchées sur les crêtes voisines. L'après-midi ils redescendent car sans soutien (de l'artillerie entre autre).

 

A mi-côte, arrêt. Et on commence à creuser des tranchées, aux côtés de tirailleurs marocains qui seuls avec les 2 compagnies du 276 me ont passé l'Aisne. Pour nourriture, des pommes cuites à l'eau et du potage. Le pain manque  depuis 2 jours,  ils sont séparés du régiment. Nuit dans les tranchées sous la pluie. La fusillade est proche pendant toute cette nuit.

14 septembre : réveil et on tente de reprendre les positions de la veille. Contact avec les Allemands dont un est blessé alors qu'il revenait chercher 5 chevaux. Il est fait prisonnier et est enfermé dans la ferme. Mais les obus tombent de nouveau qui obligent au repli dans une carrière de sable.

 

Là un capitaine les  menace carils ont  reculé, et de nouveau départ vers la ligne. Arrivés,  les obus  des 75 français leur tombent dessus, tuant un homme et en blessant beaucoup d'autres. 

 

Vers 14H ordre est donné de redescendre vers Soissons. Ils attendent à la verrerie et à la nuit, repassent l'Aisne pour rentrer dans la ville qui a subi de nouveaux dégâts.

 

Les soldats ne le savent pas encore, mais la poursuite qui a fait plus de 75 km s'arrête là, la guerre de mouvement est terminée. Va commencer la guerre de position. Les armées vont s'enterrer et le front restera figé de longs, très longs mois. Avec des épisodes douloureux, des offensives souvent inutiles, jusqu'à la guerre totale de l'année 1918.

 

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